Deliveroo condamné en France pour travail dissimulé
C’est une longue bataille qui s’achève : un ancien coursier de Deliveroo, qui avait commencé à livrer en 2015, avait engagé en 2016 une procédure contre la plateforme pour voir son contrat de prestations de service requalifié en contrat de travail. Le Conseil des Prud’hommes de Paris vient de lui donner raison en condamnant la plateforme pour travail dissimulé.

Une première en France
Une soixantaine de dossiers similaires avaient déjà été traités contre Take Eat Easy, la plateforme belge liquidée en 2016. Il y a encore un an, un membre de l’équipe OPS Deliveroo confiait avec assurance que la plateforme britannique n’était pas concerné par ces procédures, son mode de fonctionnement étant différent et écartant les risques de requalification.
La justice en a décidé autrement, puisque pour la première fois dans le cas de Deliveroo, le lien entre la plateforme et un coursier a bien été reconnu comme du travail dissimulé, plus communément nommé du salariat déguisé. Deliveroo a donc été condamné à verser 30 000€ à son ancien travailleur, en réparation des préjudices subis.
Un porte-parole de la plateforme a réagi à cette décision auprès de l’AFP : « Nous allons examiner cette décision et éventuellement faire appel », en rappelant que ce cas était spécifique à l’ancien modèle de tarification, quand Deliveroo proposait à ses coursiers une rémunération à l’heure.
Une décision motivée par les conditions d’exercice du contrat
Nous l’expliquions il y a un maintenant un peu plus d’un an, suite à l’arrêt de la Cour de Cassation contre Take Eat Easy : ce n’est pas le nom qu’on donne au contrat qui le définit, ce sont les conditions dans lesquelles il est exercé.
Si la plateforme dispose d’un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction, il existe alors un lien de subordination qui définit de fait la relation de travail comme étant du salariat. Dans cette décision contre Deliveroo, le Conseil des Prud’hommes a retenu de nombreux éléments parmi les conditions d’exercice du contrat (suivi GPS, pouvoir de sanction, rémunération et zones unilatéralement fixées), qui suffisent à dire que le coursier n’exerçait pas en tant qu’indépendant.
Que va-t-il se passer ensuite ?
Maître Kevin Mention, avocat historique des coursiers des plateformes qui a gagné cette première affaire contre Deliveroo, et qui avait rédigé pour Coursier Job l’excellente tribune « Abus du statut des coursiers : la reconnaissance du salariat renforce aussi l’indépendance », n’entend pas s’arrêter là. Il y a en effet toujours une centaine de dossiers en cours contre Take Eat Easy, et environ 90 contre Foodora, qui a quitté le marché français à l’été 2018. L’avocat s’apprête également à lancer une cinquantaine de nouvelles procédures contre Deliveroo, ainsi que contre Frichti et Stuart.